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Après un été d’incertitudes qui met à mal le tissus économique en général et celui des PME en particulier, Franck Morize, Président de la CPME du Rhône prend la parole et interpelle nos gouvernants en les qualifiants de « déconnectés » de la réalité des patrons de PME. Le coup de gueule complet et engagé d’un patron de PME en 14′ d’émission.

 

Mais combien de temps allons-nous continuer à sombrer dans cette illusion, en croyant qu’on peut travailler moins tout en dépensant plus ? Notre problème n’est pas un problème de consommation, c’est un problème de production.

Franck MORIZE, Président de la CPME Rhône

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Retranscription texte

Bonjour à toutes, bonjour à tous, et bienvenue dans cet entretien économique qui va être consacré à un point très important : la rentrée économique des petites et moyennes entreprises, à savoir les PME. Pour en parler avec nous, je reçois Franck Morize. Bonjour.

Vous êtes le président de la CPME Rhône. Merci d’avoir accepté notre invitation. Elle est importante, parce qu’évidemment, c’est la rentrée économique.

Avant de parler de la rentrée économique, Franck, comment peut-on résumer la situation générale des entreprises après un été instable ?

 

Intégrale

Franck Morize : Je veux bien vous parler de l’état d’esprit de nos adhérents. Malheureusement, ils ont de bonnes raisons d’être inquiets, même si on ne devrait pas crier avant d’avoir mal. Je pense sincèrement que nos gouvernants, aujourd’hui, sont rarement aussi déconnectés de la réalité des patrons de PME. Notre réalité, ce n’est pas une simple opinion politique. Laissez-moi vous donner quelques chiffres, si vous le voulez bien.

La réalité, c’est qu’au mois de juillet, nous avons connu le pire mois en matière de redressement collectif, c’est-à-dire de dépôts de bilan et de liquidations : 5800 sur le territoire national, dont 1090 pour le territoire lyonnais depuis le début de l’année. Cela représente une augmentation de 7 % par rapport à 2023. Pendant ce temps, on nous parle toujours de consommation, alors que cela fait 50 ans qu’on consomme à crédit. Est-ce qu’un jour, on pourrait parler enfin de production, de compétitivité, d’innovation, d’emploi, qui seront les garants du financement de notre système social, l’un des plus généreux au monde ?

Jean-François Pibre : C’est un constat alarmant. Pourtant, certains politiques envisagent même de travailler moins. Vous les avez sans doute entendus récemment.

Franck Morize : Oui, bien sûr. Mais combien de temps allons-nous continuer à sombrer dans cette illusion, en croyant qu’on peut travailler moins tout en dépensant plus ? Notre problème n’est pas un problème de consommation, c’est un problème de production. Ici, en France, autour de Lyon, nos industries ont été remplacées par des centres logistiques. On consomme de plus en plus de produits importés, hyper carbonés, et on a sacrifié notre classe moyenne. C’est un enjeu économique, social et sociétal.

Jean-François Pibre : Dans ce contexte, Michel Barnier vient d’être nommé Premier ministre. Quel regard portez-vous sur son arrivée ?

Franck Morize : Il est toujours prématuré de juger, mais certains indices laissent penser qu’il risque de céder à la facilité, comme ses prédécesseurs. S’attaquer à l’essentiel, ce n’est pas augmenter les impôts, c’est s’attaquer aux dépenses publiques. Nous avons une médaille d’or en prélèvements obligatoires : 44 % de la richesse créée par 4 millions de PME et leurs 20 millions de salariés. Ce sont eux qui paient 500 milliards de cotisations, le poids le plus élevé au monde. Est-ce qu’on pourrait enfin alléger ce fardeau pour libérer la création de richesse avant de parler de redistribution ?

Jean-François Pibre : Pensez-vous qu’il pourra y arriver, avec une majorité relative et un budget en préparation ?

Franck Morize : Sa marge politique est très étroite, mais sa marge économique est colossale. Il y a des pistes à explorer pour réduire les dépenses. Par exemple, désindexer les pensions les plus élevées ou rationaliser la superposition des collectivités territoriales. Il faut revisiter notre modèle social pour qu’il ne repose plus uniquement sur les travailleurs.

Jean-François Pibre : Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, a récemment évoqué un SMIC à 1600 euros. Quelle est votre réaction ?

Franck Morize : Elle a raison. On ne peut pas vivre dignement avec un SMIC à 1400 euros. Mais si j’augmente mes salariés de 200 euros, cela me coûte 800 euros avec les charges. Pour ma petite entreprise de 20 salariés, ça représente presque 200 000 euros par an, un montant supérieur à mon résultat net. Sans une réforme des cotisations sociales, ce type de mesure entraînera des licenciements.

Jean-François Pibre : Et que pensez-vous d’une négociation des salaires par filière ou par territoire ?

Franck Morize : C’est une bonne idée. Cela permet de redonner du pouvoir aux partenaires sociaux et de favoriser la compétitivité des entreprises. Si nous arrivons à discuter ensemble pour restaurer la compétitivité et augmenter les salaires, ce serait une avancée.

Jean-François Pibre : Pour terminer, quels sont les leviers ou les motifs d’espoir ?

Franck Morize : Il y en a plein. Nous avons une chance extraordinaire : nous sommes le pays qui travaille le moins au monde. Si nous restaurons la valeur travail et revoyons notre système de financement, nous pourrons redresser la situation. Il y a de nombreuses marges de manœuvre, il suffit de parler de la même réalité.

Jean-François Pibre : Merci Franck Morize. Nous ferons un point dans quelques semaines sur l’évolution de la situation. En attendant, bon courage.

Franck Morize : Merci à vous.

Jean-François Pibre : Merci à vous de nous avoir suivis. Vous pouvez retrouver cette émission sur notre site internet, nos réseaux sociaux et notre chaîne YouTube. Passez une belle journée et à bientôt.

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