Scop et Scic : la dynamique coopérative s’intensifie en Auvergne-Rhône-Alpes
Une vitalité économique confirmée en 2024
La région Auvergne-Rhône-Alpes continue d’afficher une dynamique coopérative robuste, en témoigne le panorama 2024 des créations de Scop et Scic dévoilé ce mois-ci. L’année écoulée aura vu la naissance de 48 nouvelles coopératives sur le territoire régional, permettant la consolidation ou la création de 295 emplois.
Ce chiffre confirme la place d’AuRA parmi les territoires les plus dynamiques de France en matière d’économie sociale et solidaire. Le modèle coopératif séduit toujours plus d’entrepreneurs, de salariés en reprise d’activité ou d’acteurs associatifs souhaitant pérenniser leurs projets tout en conservant une gouvernance démocratique et un ancrage territorial fort.
Avec désormais 721 entreprises coopératives actives sur le territoire régional, et plus de 11 000 salariés, la région s’impose comme un écosystème mature, structuré, et capable d’accompagner des projets de toute taille.
Des créations au service des territoires
Ce renouvellement entrepreneurial prend racine dans tous les départements de la région, avec une forte concentration dans le Rhône, la Loire, la Haute-Savoie, l’Isère et la Drôme. Mais au-delà des chiffres, ce sont les secteurs d’activité très variés qui marquent les esprits : BTP, imprimerie, numérique, agriculture, éducation, hôtellerie, environnement ou encore culture.
À Lyon, par exemple, Passagers des villes, une agence d’urbanisme tournée vers l’architecture sociale, a choisi de devenir Scop pour consolider son projet autour des valeurs de coopération et d’utilité territoriale. À Chambéry, Éepos, une entreprise spécialisée dans la maîtrise d’œuvre de réseaux de chaleur, a opté pour le modèle coopératif pour inscrire son développement dans une logique de transition énergétique partagée.
En Haute-Savoie, Hotelios, acteur de la tech au service de l’hôtellerie, a également rejoint le réseau coopératif. Et à Saint-Étienne, l’imprimerie Morassuti, menacée de fermeture, a été reprise par ses salariés en Scop, préservant ainsi six emplois qualifiés et un savoir-faire industriel.
Reprise d’activité : les Scop comme outil de sauvegarde
Parmi les créations 2024, plusieurs relèvent de reprises d’entreprises par leurs salariés. Ces opérations délicates, souvent déclenchées suite à un départ en retraite, une liquidation ou un changement stratégique du dirigeant, trouvent dans le statut de Scop un cadre juridique adapté. Il permet de maintenir l’activité, de préserver l’outil de production et de sauvegarder les emplois locaux.
C’est le cas de Morassuti à Saint-Étienne, exemple emblématique d’une PME industrielle qui aurait pu disparaître sans la mobilisation des salariés. L’opération de transformation en Scop a été facilitée par un accompagnement technique dédié et par une volonté collective forte.
Ces transitions nécessitent des dispositifs d’accompagnement précis : évaluation de la viabilité économique, transmission progressive des compétences, structuration d’une gouvernance partagée, mobilisation de financements spécifiques. La fédération régionale Scop AuRA joue ici un rôle essentiel, en lien avec les acteurs du financement solidaire et les collectivités.
Une gouvernance démocratique et une performance économique reconnue
Les coopératives ne se contentent pas d’un projet social ou éthique : elles s’appuient sur une logique économique solide. Le statut coopératif n’est pas une alternative marginale, mais bien un modèle entrepreneurial à part entière, basé sur la rentabilité, la durabilité et la participation active des salariés.
Avec des taux de pérennité à 5 ans supérieurs à la moyenne nationale, les Scop et Scic démontrent leur résilience dans un contexte économique encore incertain. L’ancrage territorial, la non-spéculation, la répartition équitable des excédents, et la capacité à associer salariés, collectivités et usagers dans les décisions stratégiques permettent de construire des modèles plus robustes et moins exposés aux logiques de court terme.
En Auvergne-Rhône-Alpes, ces principes se traduisent concrètement dans les chiffres : les coopératives ont généré en 2024 un chiffre d’affaires cumulé de plusieurs centaines de millions d’euros, avec une répartition équilibrée entre petites structures et entreprises de plus de 50 salariés.
Des Scic en plein essor : l’économie d’intérêt collectif prend forme
L’autre tendance forte de 2024 réside dans la progression des Scic (sociétés coopératives d’intérêt collectif), qui permettent d’associer plusieurs types de parties prenantes : salariés, collectivités locales, clients, bénéficiaires, partenaires.
Cette forme juridique connaît un succès croissant, notamment dans les secteurs liés à la transition écologique, à l’habitat partagé, aux circuits courts et à l’innovation sociale.
À Grenoble, une Scic a vu le jour autour d’un projet de tiers-lieu agricole, réunissant agriculteurs, collectivités et consommateurs. Dans le Cantal, c’est un atelier de fabrication textile qui a opté pour la forme Scic pour mutualiser la gouvernance avec ses partenaires territoriaux. À Lyon, une Scic orientée vers la logistique douce et urbaine est en train de structurer son développement avec le soutien des acteurs publics.
Ces projets traduisent une volonté forte de construire une économie coopérative, utile localement et pilotée collectivement, en rupture avec les logiques actionnariales classiques.
Une réponse aux défis de l’économie régionale
La montée en puissance des coopératives dans la région AuRA s’inscrit dans une réponse concrète aux mutations économiques en cours : pénurie de main-d’œuvre dans certains secteurs, crise des modèles classiques de gouvernance, difficulté d’accès au logement, demande croissante de sens au travail.
Le modèle coopératif répond à ces enjeux en proposant :
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Un cadre rassurant pour entreprendre collectivement,
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Un outil juridique souple et évolutif,
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Une reconnaissance accrue de la valeur créée localement,
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Une dynamique d’apprentissage et de responsabilisation des salariés.
Les coopératives offrent aussi des perspectives intéressantes aux jeunes entrepreneurs, souvent en quête d’un modèle moins vertical, plus inclusif, et attentif aux impacts sociaux et environnementaux de leurs activités.
Un écosystème structuré et soutenu
Le développement des Scop et Scic en AuRA ne serait pas possible sans un écosystème régional solide. Des structures d’accompagnement comme l’Union régionale des Scop, les collectivités locales, les Chambres des métiers, et les financeurs solidaires jouent un rôle essentiel dans l’émergence et la consolidation des projets.
Les collectivités, en particulier, sont de plus en plus nombreuses à intégrer le modèle coopératif dans leur stratégie de développement économique. Certaines accompagnent directement des projets via des appels à manifestation d’intérêt, d’autres les soutiennent via l’ingénierie, la mise à disposition de foncier ou la commande publique.
L’effet de réseau joue également à plein, avec des coopératives qui travaillent entre elles, se co-développent, mutualisent des services, et construisent des projets inter-entreprises à échelle régionale.