100 % d’autosuffisance en 2050, c’est possible : vers la création d’une filière biogaz riche de 10 000 emplois en Auvergne-Rhône-Alpes ?
Pourra-t-on totalement se passer en 2050 de gaz importé et regagner une totale indépendance énergétique ? Oui, assurent d’une même voix les directeurs de l’Ademe et de GRDF qui estiment que toutes les conditions sont réunies pour que la région produise d’ici 2050 son propre gaz. Une filière industrielle à construire qui pourrait constituer un vrai moteur économique régional au côté des autres filières d’énergie verte.
Un soutien à l’industrie, des créations d’emplois en nombre et une amélioration de notre balance commerciale : tel est l’avenir que nous dessinent à l’horizon 2050, Jérôme d’Assigny directeur de l’Ademe et Didier Saussier, celui de GRDF.
« Le gisement de gaz renouvelable injectable est estimé à 65 Twh2 dans la région Auvergne-Rhône-Alpes : elle pourrait couvrir entièrement la demande de gaz à l’horizon 2050 selon tous les scénarios que nous avons étudiés » lancent-ils d’une même voix.
S’appuyant sur une étude qu’ont effectués leurs services, ils montrent que « toutes les planètes sont alignées » pour permettre à terme à la région de produire la totalité de son gaz, sous la forme de biogaz.
Ce qui permettait de créer une filière riche de plus de 100 000 emplois en France dont plus de 10 000 en Auvergne-Rhône-Alpes et de supprimer toute importation de gaz, ce qui constituerait une vraie révolution.
Ils dessinent un scénario vertueux : un appui des pouvoirs publics au démarrage, pour arriver au seuil critique, puis un relais pris par le privé.
Comment fabrique-t-on du biogaz ?
Il existe trois possibilités de fabriquer du biogaz.
La méthanisation, d’abord, la plus connue actuellement. Elle consiste à dégrader les boues des stations d’épuration ou les déchets des exploitations agricoles et des élevages pour produire du méthane. C’est la façon la plus avancée. « Désormais la profession agricole est consciente de l’enjeu et est en train de se mettre en ordre de bataille », assure le directeur régional de GRDF.
Pour l’heure, il n’existe que quelques méthaniseurs construits, mais l’Ademe a actuellement dans ses tuyaux, pas moins de 130 projets dans la région.
Deuxième façon de produire du biogaz : la pyrogazéification, c’est-à-dire la fabrication de gaz en chauffant à très haute température des matières organiques et notamment du bois, ce dont on ne manque pas en Auvergne-Rhône-Alpes. Nous sommes en avance dans la région dans ce domaine grâce à une unité pilote (« Gaya ») créé par Engie et onze partenaires, à Saint-Fons, dans la vallée de la chimie : c’est la plus importante plateforme de biométhane de 2ème génération en Europe.
La troisième façon de fabriquer du gaz est ce qu’on appelle le « power to gaz ». Il s’agit aux heures creuses, de transformer l ‘électricité excédentaire en gaz, en produisant du méthane par électrolyse de l’eau en utilisant l’électricité renouvelable et la méthanation de l’hydrogène produit, en présence de dioxyde de carbone. On sait faire, ça ne pose aucun problème technique « et c’est extrêmement prometteur », assure le patron de l’Ademe. A telle enseigne que 30 % du gaz pourrait être produit de cette manière en 2050, pour 30 % pour la méthanisation et 40 % pour la pyrogazéification.
Des start-up biogaz
Autre atout mis en avant par les responsables de l’Ademe et de GRDF : nous bénéficions déjà dans la région de jeunes entreprises spécialisées dans l’exploitation du biogaz et qui croissent très vite.
Et ce, à l’exemple de sociétés comme l’entreprise drômoise Prodeval qui emploie une cinquantaine de salariés et connaît une hyper-croissance.
On pourra atteindre cette autosuffisance à 100 % en matière gazière grâce aussi importantes économies de consommation qui ont commencé à se faire jour et devraient même s’intensifier.
Ainsi, par exemple, dans l’ancienne usine Bosch de Vénissieux, la société BoostHeat est en train de fabriquer des chaudières à gaz qui offrent en matière de consommation de gaz un rendement approchant les… 200 % !
Les projections faites par cette étude prévoient ainsi dans la région Auvergne-Rhône-Alpes une consommation de 47/47 Twh2 de gaz, en 2050, contre 54 actuellement. Un gaz, c’est sûr qui sera beaucoup plus cher, les projections escomptent un quasi-doublement, mais comme on en consommera nettement moins, la hausse devrait être supportable.
Bref, si tout les acteurs travaillent ensemble, tout est possible ; et il faut reconnaître que c’est assez enthousiasmant. Il ne reste plus qu’à éviter les erreurs commises pour la filière photovoltaïque qui a vu la fabrication de ses panneaux prendre la direction de la Chine.
Si l’on veut créer une vraie filière biogaz en Auvergne-Rhône-Alpes, il faudrait donc commencer par développer ses soubassements industriels. L’économie verte, pour demain ?
En tout cas, prochainement, « des signaux forts devrait être prochainement lancés par le Conseil régional » pour lancer véritablement cette filière…