Faut-il encore croire à une filière solaire rhônalpine ?
Deux opérateurs importants dans les panneaux photovoltaïques -Tenesol à Saint-Genis-Laval et Photowatt à Bourgoin-l’Institut National de l’Energie Solaire (Ines) installé à Chambéry, un pôle de compétitivité dédié (Tennerdis) : sur le papier, Rhône-Alpes a tout pour être bénie des dieux solaires.
Pourtant, les récentes difficultés rencontrées par Photowatt portent une ombre sur ce bel ensemble. La maison-mère canadienne de Photowatt (ATS) a même dépêché un nouveau directeur, Patrice M. Pelletier, pour tenter de remettre l’entreprise sur pied. Celle-ci a subi des mesures de chômage technique au printemps dernier, tandis que les usines ont été fermées trois semaines cet été. Une première pour une société jusqu’alors citée en exemple et qui avait des projets d’extension très importants. Des propres aveux de Patrice M. Pelletier, « les résultats financiers de Photowatt au cours du premier trimestre 2009 (d’avril à juin) ont été désastreux, avec des pertes importantes. »
Le nouveau directeur de la société de Bourgoin-Jallieu (Isère) est alarmiste : « cette conjoncture fragilise et peut même à moyen terme, mettre en danger la base de la filière photovoltaïque française. » Rien de moins ! La raison ? La Chine s’est lancée à corps perdu dans la filière solaire, avec à la clef une surcapacité de production et une chute importante des prix. Les Chinois produisaient il y a cinq ans l’équivalent de Photowatt. Ils sortent désormais cinquante fois plus de leurs unités de production ! Résultat : les prix du solaire ont été divisés par deux, déstabilisant le marché.
La solution pour permettre à Photowatt de sortir de cette nasse est de diminuer ses coûts en s’appuyant sur la recherche et l’innovation et à moyen terme d’augmenter se production. Le mariage des nanotechnologies dont Grenoble est une plate-forme mondiale et du solaire (projet PV Alliance) apparaît à cet égard très prometteur.
Mais pour le patron de Photowatt, les fabricants doivent être aidés dans cette phase délicate : « Il nous apparaît absolument essentiel que le gouvernement français appuie et supporte fortement sa filière française qui est attaquée de toute part par des sociétés étrangères qui vendent au rabais leurs produits en France sans ce soucier des objectifs de développement durable qui doivent être nécessairement associés à l’émergence de l’énergie solaire en France. Il y a des exemples probants, dont l’Espagne, qui faute d’avoir développé une filière solaire industrielle nationale forte, a vu sa part de marché en énergie solaire s’effondrer. »
Or, dans ce contexte difficile, on a appris cet été, qu’avec l’onction de Jean-Louis Borloo, ministre de l’environnement, le n°1 américain, First Solar s’est allié avec EDF-Energie Nouvelle pour construire en France une nouvelle usine de panneaux solaires qui devrait être implantée non pas en Rhône-Alpes, mais probablement dans les Alpes de Haute-Provence, avec le risque d’accentuer les surcapacités.
A n’en pas douter, une course de vitesse est engagée pour que la région Rhône-Alpes se dote d’une véritable filière solaire. Au-delà le développement d’une telle filière dans l’Hexagone est posé. Mais ne nous voilons pas la face : il faudra y mettre le paquet. A ce propos, le futur grand emprunt n’aurait-il pas là un rôle à jouer ?