La start-up SymbioFCell lancera en mars à Grenoble les 1ères lignes de fabrication en Europe de piles à combustible
La HyKangoo ZE de Renault à pile à combustible signée de la start-up savoyarde SymbioCell a suscité un grand intérêt lors du dernier Mondial de l’Automobile. Grâce à de nombreux brevets et une solide équipe de R&D, cette entreprise démarrera au printemps prochain à Grenoble deux lignes de fabrication au sein d’une usine appartenant à Siemens Energy. Ses piles à combustibles devraient figurer parmi les moins chères du marché.
Sur le stand 437, allée D, Hall 3 du Mondial de l’Auto trône une voiture électrique qui n’est pas tout à fait comme les autres. Il s’agit d’une Kangoo de Renault, certes électrique, mais dotée d’un « plus » : elle produit sa propre énergie, grâce à une une pile à combustible (PAC*) fonctionnant à l’hydrogène et signée d’une start-up de la région Rhône-Alpes de vingt salariés, SymbioFCell.
Tous les spécialistes le savent : après la voiture électrique à faible autonomie car ne fonctionnant que sur batteries qui n’est destinée qu’à assurer la transition, la génération suivante des véhicules durables sera celle de la pile à combustible. C’est la raison pour laquelle Renault, le constructeur qui a le plus investi au monde dans les véhicules électriques, ne prend pas de grands risques. Il prépare déjà la génération suivante.
Pour preuve, en partenariat avec la société SymbioFCell, mais aussi d’autres spécialistes de la PAC, le constructeur automobile national s’attelle déjà à développer cette nouvelle frontière de la voiture verte.
Pour preuve encore, cette Renault HyKangoo ZE, tout électrique, équipée d’une pile à combustible exposée au Mondial de l’Automobile à Paris. Grâce à son dispositif hydrogène, elle double son autonomie qui passe de 160 km à plus de 320 km. Mieux, la pile à combustible développée par SymbioFCell, permet de couvrir également les besoins énergétiques du système de chauffage et de climatisation du Kangoo. Plus à craindre de mettre trop fort le chauffage l’hiver de la voiture, au risque de vider trop vite la batterie !
Et demain, lorsque les stations-services seront équipées, on fera le plein d’hydrogène, comme aujourd’hui on fait celui d’essence ou de gasoil.
Un surcoût de 15 à 20 % seulement
« Cette pile nous la construisons actuellement artisanalement avec un surcoût de 50 %. Demain, lorsque la ligne de fabrication sera capable de produire plusieurs milliers de piles à combustible, le surcoût ne dépassera guère 15 à 20 % par rapport à une simple voiture électrique. Et lorsque nous lancerons de longues séries, ces surcoûts baisseront encore… », assure sur le stand SymbioFCell du Mondial, Pierre-Yves le Berre, vice-président chargé de la stratégie et du développement.
Cette présence au Mondial préfigure le lancement de la fabrication en séries. « Nous démarrerons la fabrication en mars prochain au sein d’une usine de Siemens Energy à Grenoble que nous avons comme partenaire. Nous pensons sortir la première année plusieurs milliers de piles à combustible », lance Pierre-Yves le Berre. Un investissement d’un million d’euros.
Elles viennent d’être officiellement inaugurées par Alain Cottalorda, le président de l’Agence de développement économique du département de l’Isère : deux lignes de production sont en cours d’installation, l’une de PAC de petite puissance pour équiper des véhicules légers électriques ; et la seconde pour des prototypes de forte puissance, jusqu’à 300 kW, pour des camions, bateaux ou bus silencieux et non polluants.
La demande commence à se faire jour. Chez SymbioFCell, on a bien conscience qu’il est encore trop tôt pour la voiture à hydrogène grand public. En revanche les flottes captives d’entreprises et de collectivités et les véhicules spécialisés ouvrent un champ très important.
Les projets sont nombreux. Outre la HyKangoo, figure une pelleteuse silencieuse et non polluante, des piles pour camions, bus, bateaux, véhicules à chenilles, telles les dameuses de pistes de skis (avec le fabricant Aztec), etc..
Une « perle » à la tête de la R&D
Une question se pose à la vue de ces projets. Pourquoi SymbioFCell semble réussir là où de grands groupes semblent aller plus lentement, en engloutissant pourtant des dizaines de millions d’euros ? Parce que cette société dont le siège est basé au Bourget-du-Lac en Savoie a à la tête de son équipe de R&D une perle, Luc Rouveyre, spécialiste de cette technologie : il a notamment passé cinq ans dans l’équipe de recherche sur la PAC de Nissan au Japon. Il est auréolé d’une quarantaine de brevets.
SymbioFCelle a en outre développé un partenariat avec le CEA qui lui permet aussi de bénéficier d’autres brevets. « Nous avons réussi à simplifier de manière importante le fonctionnement des piles à combustible et à diminuer le nombre de composants qui coûtent très chers, ce qui explique la réduction des coûts », décrit Pierre-Yves le Berre.
Cette avance technologique permet à SymbioFCell d’envisager 10 millions d’euros de chiffre d’affaires dès 2012.
Fabio Ferrari, son Pdg, devrait lancer un deuxième tour de table à la mi-2013 qui devrait avoisiner les cinq millions d’euros. Il s’agit pour la start-up de maintenir cette avance et de prendre de vitesse ses concurrents. Un futur grand français de la pile à combustible est peut-être en train de naître à Grenoble…
(*) PAC (Pile A Combustible), comment ça marche ? Contrairement à la voiture électrique qui doit se recharger, la PAC permet de produire de l’électricité à partir de l’hydrogène avec l’insigne avantage de ne rejeter que de l’eau. Son fonctionnement procède d’un simple processus électrochimique. On met d’un côté de l’hydrogène, de l’autre de l’oxygène. Tous deux se rencontrent à travers une membrane produisant des échanges de protons et donc de d’électricité. Il n’y a pas de combustion, et donc pas d’émission de CO2.
Photo (DR)–La pile à combustible, signée SymbioFCell et l’usine grenobloise qui est en train d’accueillir les deux chaînes de fabrication.