« Les entreprises vont devoir anticiper la trésorerie »
Un contexte général, positif, pour combien de temps ?
Une croissance en trompe l’œil ? C’est en filigrane ce que l’on peut retenir de l’analyse conjoncturelle publiée, mi-septembre, par l’ordre des experts-comptables Auvergne-Rhône-Alpes. Ce point de conjoncture démontre qu’au 2e trimestre 2023, l’indice de chiffre d’affaires (ICA) des 109 400 TPE-PME d’Auvergne-Rhône-Alpes, de l’échantillon des experts-comptables, est de 104,5, soit une progression de 4,5% de leur chiffre d’affaires par rapport au 2e trimestre 2022. L’indice de chiffre d’affaires cumulé (ICAC) montre que les entreprises régionales ont vu leur activité augmenter de 4,5% depuis le début d’année, comparativement à la même période de l’année précédente. Derrière cette réalité, il est d’usage de mettre un bémol, en l’occurrence le taux d’inflation qui a naturellement dopé les chiffres d’affaires des entreprises. Cet état de fait pourrait se révéler pervers dans un certain nombre de secteurs d’activité, dans l’année qui vient.
L’ immobilier plonge !
A la lumière de cette étude, l’immobilier connaît un net recul de son activité. Les 1 800 agences immobilières de l’échantillon voient leur CA fortement reculer en valeur au 2e trimestre 2023 par rapport au 2e trimestre 2022 (-17,7%). En cumulé depuis le début d’année, la baisse d’activité atteint -11,9%. La remontée des taux d’intérêt continue d’impacter fortement le secteur. Le taux moyen atteignait ainsi 3,45% en juin alors que celui-ci se situait encore aux alentours de 1% en janvier 2021. Les Français ont encore perdu en moyenne 5m2 de surface à l’achat depuis janvier 2023, dans les vingt plus grandes villes du pays. Cela étant, « l’on revient peut-être aussi à des prix plus raisonnables, qui avaient explosé durant la crise du COVID, souligne Odile Dubreuil, la présidente de l’ordre des experts-comptables Auvergne-Rhône-Alpes qui précise en substance : « l’immobilier n’est pas le seul domaine à connaître des difficultés ; la promotion immobilière, la rénovation ou encore le BTP éprouvent aussi des difficultés en raison de l’inflation, de l’augmentation des matières premières et aussi du manque de main d’œuvre. Globalement, selon les derniers chiffres du tribunal de Commerce de Lyon, le nombre de défaillances commence à augmenter et si nous sommes à peu près au même tôt qu’en 2019, cela risque de s’accélérer ».
Le tourisme et la restauration résistent !
Les 1 100 hôtels et hébergements de l’échantillon enregistrent une croissance de 9,6% en valeur lors du 2e trimestre 2023 et de 10,5% en cumulé depuis le début d’année. De leur côté, les 4 600 restaurants traditionnels de l’échantillon ont vu leur activité croître de 3,4% en valeur au 2e trimestre 2023 par rapport au 2e trimestre 2022. Ils affichent une hausse cumulée de 7,3% depuis le début d’année. Mais cette hausse, en partie due à l’inflation, doit être analysée avec prudence.
« Anticiper la trésorerie, un impératif »
Pour passer cette période incertaine, « les chefs d’entreprises devront anticiper, ce sera le maître mot ! conseille Odile Dubreuil, il faudra avant tout penser au cash net, c’est-à-dire la trésorerie restate après déduction des dettes prévues, et ainsi tenter de faire une prévision sur six mois afin de consolider l’activité. Et si on s’aperçoit que cela peu coincer alors il faudra faire de la haute couture et faire du cas par cas afin de traverser cette période. In fine, le chef d’entreprise ne doit pas faire l’autruche en cette rentrée et devra sans doute se remettre en question ».
Une année encore incertaine
Quelles sont les perspectives ? « C’est un peu compliqué de prévoir l’avenir dans un monde imprévisible, admet Odile Dubreuil mais je pense tout de même qu’il faut tout de même travailler sur des budgets de trésorerie à courte échéance, revoir parfois son modèle économique, mais il est délicat de faire des pronostics car cela dépendra notamment en grande partie du pouvoir d’achat et de l’évolution du contexte global. Des grandes manifestations telles que la Coupe du monde de rugby et les JO de Paris pourraient être des leviers de croissance ! Mais pour conclure, il est vrai que les prévisions ne sont pas très optimistes mais il faut avancer ».