Photowatt : le sauvetage élyséen qui se dessine
Une vingtaine d’entreprises ont marqué leur intérêt pour la reprise de la société berjalienne Photowatt. Parmi elles, des poids lourds, comme St-Microelectronics ou EDF Energies nouvelles qui ont les moyens financiers de relancer l’entreprise en redressement judiciaire depuis le 8 novembre dernier. Mais aucun dossier ferme n’a encore été déposé au Tribunal de Commerce de Vienne. C’est la raison pour laquelle, le dépôt des candidatures a été repoussé au 10 février. Cette afflux a une explication : l’Elysée qui gère le dossier à distance pourrait promettre au repreneur 240 millions d’euros de commandes permettant d’assurer le plan de charge pendant plusieurs années. Mais on n’en est pas encore là…
Quel avenir pour Photowatt ? Mardi 17 janvier à 15 heures, les juges consulaires du Tribunal de Commerce de Vienne se sont penchés sur ce dossier très sensible en cette période d’élection présidentielle.
A l’issue de cette séance à laquelle participaient notamment les délégués du comité d’entreprise et la direction de l’entreprise, il a été décidé de donner un nouveau délai pour le dépôt des candidatures : le 10 février. Le Tribunal de Commerce de Vienne statuera ensuite le 21 février. C’est ce qu’avaient démandé certains gros candidats à la reprise de Photowatt, le pionnier français du photovoltaïque placé en redressement judiciaire depuis le 8 novembre.
Contrairement aux apparences, ce délai constitue plutôt une bonne nouvelle. Pendant près d’un an, la société canadienne ATS, propriétaire de Photowatt avait sans succès tenté de vendre cette entreprise. Personne n’en voulait.
Par le miracle du dépôt de bilan, les candidats se bousculent désormais : une vingtaine au total ont marqué « des marques d’intérêt ». Celà signifie qu’aucun dossier en bonne et due forme n’a encore atterri sur le bureau du président du Tribunal de Commerce. Parmi les entreprises intéressées, de nombreuses PME, mais aussi « quatre à cinq repreneurs crédibles qui sont capables de faire des propositions fermes qui tiennent la route si on leur donne le temps de le faire », estimait dès la fin de semaine dernière Vincent Bès, directeur général de l’entreprise.
Parmi ces candidats « crédibles » figurent deux sociétés cotées : le franco-italien St-Microelectronics, mais aussi la filiale d’EDF, EDF Energies nouvelles.
Que s’est-il donc passé entre-temps ? Tout simplement le fait que nous soyons en période électorale. Au fur et à mesure que les échéances se rapprochent et que le « produire français » s’insinue de manière de plus en plus insistante dans la campagne, le dossier devient très sensible.
A tel point que le dossier de cette entreprise qui est totalement intégrée et est la seule en France à dérouler toute la chaîne de fabrication de panneaux photovoltaïques, est remonté jusqu’à l’Elysée.
Le Lyonnais René Ricol, également ordonnateur du Grand Emprunt s’est penché à la demande de Nicolas Sarkozy sur le dossier.
Il est vite apparu qu’à l’heure où l’on parle de réindustrialiser la France, il serait du plus mauvais effet de laisser filer Photowatt vers d’autres mains, notamment chinoises.
Photowatt posséde avec EDF énergies nouvelles et le CEA, une co-entreprise qui emploie une centaine de personnes : PV Alliance. Une véritable pépite qui a beaucoup travaillé sur les panneaux photovoltaïques du futur à haut rendement (à base de slicium métallurgique), mais aussi ceux à très haut rendement (à base de polysilicium), avec de nombreux brevets à la clef.
Pour cette filière qui ne connaît pas un coup d’arrêt, mais une crise de croissance, il serait dramatique et aberrant que ces brevets partent à l’étranger.
Il faut comprendre que la filière photovoltaïque française connaît une crise de croissance due au moratoire, puis à la diminution voulue par le gouvernement des subventions à l’électricité produite. Il faut savoir aussi que selon les spécialistes, à la vitesse à laquelle, l’innovation progresse dans cette filière, le prix de l’électricité photovoltaïque sera d’ici 2016/2017 similaire au coût moyen de l’électricité. Il faut donc tenir jusque là.
L’Elysée envisage donc de demander aux entreprises publiques de susciter pour 240 millions de commande sur trois ans pour relancer Photowatt. Un carnet de commandes qui lui permettrait de repartir de l’avant et redonne un attrait évident à l’entreprise berjallienne.
« L’Etat veut bien investir de l’argent qui est de l’argent français, mais pour qu’il revienne vers les Français », explique ainsi Nathalie Kociusko-Morizet, ministre de l’Ecologie.
L’Etat a les moyens de sauver Photowatt et semble vouloir les mettre en œuvre. Le maintien d’une filière française photovoltaïque est à ce prix.
Photo (DR) : L’usine Photowatt de Bourgoin-Jallieu (Isère).