Rémy Weber, Pdg de la Lyonnaise de Banque : « les chefs d’entreprises encore attentistes pour leurs investissements »
Pour le Président de la Lyonnaise de Banque, les chefs d’entreprise qui voient leur trésorerie s’améliorer et sont en voie de retrouver leur niveau de chiffre d’affaires d’avant crise, vivent actuellement un moment-clé. Ils doivent décider si oui ou non, ils investissent dans leur outil de production. Un choix qui nécessite la confiance dans l’avenir. Or, le climat actuel, marqué par la catastrophe japonaise, les difficultés de la dette européenne et les décisions prises par les autorités de régulation à l’égard des banques, ne sont pas pour l’heure aptes à leur faire franchir le pas de l’investissement. Il espère que malgré ces contraintes, la banque qu’il dirige, rééditera l’année prochaine le résultat net record de 202,7 millions d’euros enregistré l’année dernière (-1,4 %).
La Lyonnaise de Banque a réédité l’année dernière le résultat net historique déjà enregistré en 2009 et supérieur aux 200 millions d’euros. Très précisément 202,7 millions, en recul de 1,4 % par rapport à 2009 (205,4 millions d’euros). Il est vrai aussi que ce résultat historique a été, comme l’année dernière, dopé par les plus-values de cession de la Banque de Vizille, la banque d’affaires de la Lyonnaise, dont le périmètre change pour s’intégrer aux côtés d’IPO et de CCI Finance pour devenir un acteur national sous le vocable de CM-CIC Capital Finance (100 collaborateurs dont 40 à Lyon).
Aucun doute, grâce à la reprise économique, à l’instar de la plupart des banques de détail, la banque régionale qui fait partie intégrante du CIC et donc du Groupe Crédit Mutuel présidé par Michel Lucas, a réalisé l’année dernière un bon exercice. En témoigne aussi le Produit Net Bancaire (le chiffre d’affaires pour une banque) qui s’affiche en hausse de 8,7 %.
Ceci s’explique facilement : la quasi-totalité des activités commerciales de la banque ont progressé. L’épargne a bondi de 25 %, portant la croissance de l’encours d’épargne à + 6,7 %.
Idem pour les crédits qui sont en hausse de 18,3 % et retrouvent leur niveau de 2008. Le redémarrage de l’immobilier a provoqué un effet favorable sur les comptes : la production de crédits sur l’habitat s’est envolé de 32,4 %. Il en est de même pour les crédits d’investissement (+ 16,4 %), mais il est vrai que l’on partait de fort bas, du fait de la crise.
Le deuxième pilier de la rentabilité de la banque, l’assurance, connaît, elle aussi, une bonne croissance : aussi bien celle des biens (+ 4,7 %), que des personnes (+ 7,5 %), avec un bond de 49 % pour l’assurance santé, un nouveau métier pour la Lyonnaise, développant désormais un domaine qui a fait les beaux jours de sa maison-mère, le Crédit Mutuel.
Autre satisfaction pour le Président de la Lyonnaise : le plan de développement lancé il y a dix ans s’est achevé et a permis la création de 28 nouvelles agences, portant leur nombre total à 403. « Nous sommes à la fin d’un effort important de remise à niveau de notre parc d’agences », se félicite Rémy Weber. Le mouvement aura encore des effets en 2010 avec l’ouverture de 10 agences cette année pour l’essentiel en PACA, hormis une ouverture à Lyon Félix Faure.
Bref, tout devrait aller pour le mieux et le redémarrage s’amplifier, mais… « Nous sommes à un moment clé. Les entreprises ont retrouvé un niveau de trésorerie plutôt bon. Elles ont regonflé leur chiffre d’affaires. Et elles doivent désormais décider si elles investissent ou non pour développer leur outil de travail. Et là, tout est affaire de confiance… », décrit le président de la Lyonnaise.
Or, cette confiance pourrait être obérée selon Rémy Weber, par plusieurs nuages noirs. A commencer bien sûr par le Japon « qui pourrait bien avoir un impact sur la croissance mondiale », ainsi que la question de la dette en Europe, toujours en suspend.
Il y ajoute les conséquences de la régulation mise en œuvre, suite à la crise financière que nous avons connue. Le paradoxe est que ce sont les banques de détail qui pourraient connaître les plus fortes conséquences, alors qu’elles n’ont été pour rien dans la crise, contrairement aux banques d’affaires.
Les mesures de régulation annoncées pourraient, selon Rémy Weber, influer notamment sur le crédit accordé aux entreprises. L’explication : chaque banque cote les entreprises avec lesquelles elle travaille : de A (excellente santé) à F (contentieux). Or, jusqu’à présent, les banques bénéficiaient d’une grande liberté. Celle-ci va être remise en cause par les autorités de régulation, obligeant les banques à utiliser un plus ou moins grand pourcentage de leur fonds propres, précisément codifié, lorsqu’il s’agira de prêter à ces mêmes entreprises. Bref, un corset à venir qui n’enthousiasme pas, loin s’en faut, Rémy Weber.
Les fonds propres impactés seront évidemment d’autant plus élevés lorsque l’entreprise est mal cotée. « Nous voyons déjà des banques qui privilégient des entreprises bien notées au détriment des autres », déplore Rémy Weber. Or la grande majorité des PME sont cotées entre B – et D +. On verrait alors cette régulation mise en œuvre pour de bonnes raisons, avoir des conséquences négatives sur les crédits faits aux entreprises. Ce qui illustrerait une nouvelle fois l’adage : le mieux est l’ennemi du bien !
Photo (TLM) : Rémy Weber : « Nous voyons déjà des banques qui privilégient des entreprises bien notées au détriment des autres. »