Thorizon et Storabelle : une alliance franco-néerlandaise pour une énergie industrielle flexible et décarbonée

Le 23 avril 2025, les start-up Thorizon et Storabelle ont annoncé un partenariat stratégique pour accélérer le développement de solutions énergétiques basées sur les sels fondus, destinées aux industries à forte intensité énergétique. Cette alliance technologique franco-néerlandaise se construit autour d’une ambition claire : combiner réacteur nucléaire modulaire (SMR) et stockage thermique longue durée pour répondre aux défis majeurs de la transition énergétique.
Pour Lyon et la région Auvergne-Rhône-Alpes, l’enjeu est autant technologique qu’économique. Avec son bureau d’études basé à Lyon, Thorizon inscrit l’innovation nucléaire décarbonée dans le paysage industriel régional, en synergie avec les grands noms du secteur comme Orano, EDF ou Tractebel.
Une solution commune autour du sel fondu, technologie clé du futur énergétique
Le sel fondu, utilisé depuis plus de 30 ans dans les centrales solaires thermodynamiques, revient sur le devant de la scène comme vecteur énergétique prometteur. Sa capacité à stocker de la chaleur à plus de 600°C pendant plusieurs jours avec de faibles pertes en fait un allié de choix pour la gestion de l’intermittence des énergies renouvelables.
C’est cette technologie que Thorizon et Storabelle ont choisi de mutualiser :
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Thorizon développe un petit réacteur modulaire (MSR) à sels fondus, visant une production de chaleur nucléaire intrinsèquement sûre, avec un profil de déchets réduit.
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Storabelle, quant à elle, propose une solution de stockage thermique longue durée, capable de convertir l’excédent d’électricité renouvelable en chaleur ou en électricité via une “batterie Carnot”.
Le couplage des deux approches ouvre la voie à une offre énergétique flexible, stable, décarbonée et adaptée aux usages industriels.
Objectif : répondre aux besoins énergétiques critiques des industriels
L’un des principaux défis pour les industriels aujourd’hui est de décarboner leur usage énergétique sans compromettre leur performance ou leur continuité de production. La combinaison Thorizon–Storabelle se positionne comme une alternative aux chaudières fossiles, en fournissant de la chaleur industrielle compétitive en coût et adaptable à la demande.
L’intérêt est double :
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Sécuriser une source d’énergie non intermittente et pilotable, en complément du solaire et de l’éolien,
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Offrir une solution modulaire, évolutive, adaptée aux zones industrielles ou aux sites isolés.
Selon Laure Claquin, COO de Thorizon, « nous constatons une forte demande pour des solutions d’alimentation flexibles. Ce partenariat permet de proposer une réponse industrielle, concrète, évolutive. »
Lyon, un hub stratégique pour la filière nucléaire nouvelle génération
Installée à la fois à Amsterdam et Lyon, Thorizon incarne la nouvelle génération des start-up “deeptech” nucléaires. Son projet de réacteur à sels fondus Thorizon One vise une première mise en service à l’horizon 2030. L’entreprise bénéficie du soutien du plan France 2030, avec un financement public pour le développement d’un prototype non nucléaire à court terme.
Le choix de Lyon n’est pas anodin : la région Auvergne-Rhône-Alpes constitue l’un des écosystèmes les plus dynamiques du nucléaire français, avec la présence d’EDF, Framatome, Orano, mais aussi du CEA, avec lequel Thorizon collabore activement. Cette implantation permet à la start-up :
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de s’inscrire dans des réseaux industriels solides,
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de recruter des profils techniques spécialisés,
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de participer aux dynamiques territoriales autour de l’innovation énergétique.
Une coopération aux ambitions européennes
Storabelle, de son côté, voit dans ce partenariat l’occasion de s’ouvrir aux marchés industriels européens, et notamment aux Pays-Bas, très engagés dans le déploiement d’énergies renouvelables et de solutions de stockage. Le marché français, avec sa volonté de relance du nucléaire via des SMR et son tissu industriel dense, représente également une cible prioritaire.
Ce partenariat a donc une portée transnationale, dans un contexte où les questions de souveraineté énergétique et de relocalisation industrielle sont devenues critiques. Il s’inscrit dans les logiques actuelles de coopérations industrielles européennes sur les technologies de rupture, soutenues par les politiques publiques.
Une offre BtoB intégrée pour les grands consommateurs d’énergie
L’un des objectifs de l’alliance est de bâtir une offre de marché intégrée pour les industriels, combinant production de chaleur nucléaire, stockage, et distribution d’énergie modulable. Cette intégration vise à répondre à plusieurs besoins concrets :
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Remplacer les sources fossiles (gaz, fuel) dans les procédés industriels,
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Assurer une alimentation stable pour les installations électro-intensives,
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Limiter les pics de consommation sur le réseau, grâce à un stockage piloté.
Thorizon et Storabelle vont notamment travailler à :
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la conception commune d’échangeurs de chaleur sel-sel,
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une boucle d’essai technologique pour tester la chaîne complète,
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et l’optimisation économique du modèle (analyse de rentabilité, CAPEX/OPEX, gains CO₂).
France 2030 et financement public : un levier structurant
La collaboration bénéficie du soutien du plan France 2030, qui finance des projets de réacteurs innovants, avec une logique d’accélération du prototypage et de la mise en service commerciale. Dans ce cadre, Thorizon prévoit de lancer son démonstrateur à court terme, en coopération avec plusieurs grands noms de l’industrie énergétique.
Ces fonds permettent de :
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réduire le time-to-market,
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sécuriser les phases de conception avancée,
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et créer un effet de levier auprès d’investisseurs privés.
La démarche s’inscrit dans une volonté claire de redonner à la France une position de leader dans les technologies nucléaires de nouvelle génération, en lien avec la transition énergétique.
Quel potentiel économique pour la région Auvergne-Rhône-Alpes ?
Pour la région, ce projet représente une opportunité stratégique à plusieurs niveaux :
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création d’emplois qualifiés dans les secteurs de l’énergie, du génie thermique et du nucléaire,
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développement de la filière SMR à travers des PME et des bureaux d’études locaux,
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impact potentiel sur les zones industrielles à forte consommation énergétique (vallée de la chimie, métallurgie, agro-industrie…),
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et enfin, visibilité accrue à l’échelle européenne sur les innovations énergétiques “made in AURA”.
En s’ancrant à Lyon, Thorizon renforce le positionnement régional comme hub d’innovation nucléaire et énergétique, en complément des grands projets menés par Framatome ou Nuward.
Le partenariat entre Thorizon et Storabelle témoigne d’un virage technologique majeur dans la réponse aux besoins énergétiques industriels. Pour la région Auvergne-Rhône-Alpes, il marque une étape dans la construction d’un écosystème autour du nucléaire de nouvelle génération et du stockage décarboné. Plus qu’un accord technique, c’est un signal politique et économique fort, adressé aux acteurs de la transition énergétique en France et en Europe.