Ce que nous dit le phénomène co-working
Il y a trois ans, la carte du co-working à Lyon était vierge. Lorsqu’on la regarde désormais, on retrouve sept espaces, dispersés sur l’agglomération et regroupant un total de six-cents co-workers âgés entre vingt et quarante ans sur un total de 1 700 m2 de locaux. Une génération spontanée que personne n’a vu venir et qui s’est propagée comme un feu de paille.
Tous ces espaces sont nés d’initiatives individuelles de jeunes dirigeants de start-up. Contrairement aux pépinières aidées par les collectivités et qui leur ressemblent-de loin- , aucune aide financière à la clef. La nouvelle génération start-up se prend elle-même en main.
Le tout premier est né en 2011 : « L’Atelier des Médias », depuis…
Le tout premier espace de co-working à Lyon est né en 2011 au pied des pentes de la Croix-Rousse : « l’Atelier des Médias ». Il rassemble désormais près de 40 co-workers, des résidents, des nomades. A l’origine, cinq journalistes qui en avaient assez de tourner en rond chez eux. Ils se sont rapprochés pour créer un espace de travail « stimulant et convivial ».
Il a été suivi par trois espaces différents, mais placés sous une même enseigne : « La Cordée », à Villeurbanne, mais aussi dans les 1er et le 2ème arrondissements. « La Cordée » s’adresse essentiellement aux co-workers nomades qui travaillent quotidiennement ou ponctuellement. Ce qui explique le nombre de membres : 470 co-workers et 50 start-up hébergées. La Cordée joue aussi le rôle d’incubateur.
Un peu plus haut sur les Pentes de la Croix Rousse, rue Romarin, un autre espace à vu le jour il y a un an : « Ecoworking ». Il affiche déjà complet ! Il rassemble essentiellement des co-workers résidents, des petites entreprises de un à trois salariés. A son origine quatre créateurs de start-up : Guillaume, Aurélien, David et Thomas. Il ne s’agit pas d’une association, mais d’une Sarl dont l’équilibre économique est déjà atteint.
L’Economie Sociale et Solidaire a aussi suscité ses espaces de co-working. Ils sont deux à avoir vu le jour à Lyon. L’un d’entre eux, « Etic », accueillant 50 co-workers s’est installé à Vaulx-en-Velin et un second dans le quartier de la Guillotière dans le 7ème arrondissement de Lyon, « Locaux Motiv’ ». Il rassemble 40 co-workers.
Une charte du co-working
Le Grand Lyon qui regarde avec sympathie cette effervescence qui cadre bien avec son désir de faire grossir l’écosystème numérique lyonnais et son souhait d’être labellisé French Tech, a accompagné le mouvement en suscitant un « Collectif co-working Grand Lyon » pour que ces espaces se regroupent autour des valeurs qui leur sont communes : « le partage, la transparence, la bienveillance et l’égalité », décrit la charte que tous ont signé.
Car ces espaces contrairement à ce que l’on pourrait croire ne sont pas de simples lieux collectifs de travail permanents, de nouveaux centres d’affaires, mais vont bien au-delà et constituent le signe d’une nouvelle contre-culture du travail né du Web que décrit si bien le futurologue américain Jeremy Riftkin qui évoque « le nouveau paradigme collaboratif qui mènera à une société plus intelligente et plus durable,… où la coopération chasse la concurrence… » (*)
Aurélie Khalidi, une graphiste Web, créatrice de la société « Orange vif », présidente de l’Atelier des Médias »t qui a vécu le phénomène dès l’origine, l’exprime très bien.
« J’ai travaillé seule chez moi pendant trois ans devant mon ordinateur. J’avais l’impression de devenir autiste. Au sein de l’ « Atelier des Médias », nous fonctionnons sur le mode associatif : et l’on constate très vite que malgré l’absence de hiérarchie, chacun s’investit dans l’organisation . »
Elle a aussi constaté que cette agrégation de compétences « permet de créer un véritable réseau et suscite des projets collectifs, fait naître de véritables opportunités. »
« Cet espace nous insuffle de l’enthousiasme et du dynamisme »
Elle poursuit : « Le fait de travailler dans le même espace permet d’insuffler de l’enthousiasme et du dynamisme, tout en nous permettant, par le contact avec les autres d’acquérir en permanence de nouvelles compétences. On se rend rapidement compte que lorsqu’un projet précis est proposé, on peut faire travailler au sein de notre structure les personnes les plus adaptées, les plus compétentes pour y répondre.. »
Hors le pur travail, ce sont aussi des lieux de bouillonnement et de créativité. Depuis le début de l’année plus de quatre cents événements les plus variés se sont déroulés au sein de ces différents espaces. A l’instar d’une « Game Dev party » une session de développement de jeux vidéo qui se déroule chaque année tout un week-end dans les locaux de « l’Atelier des Médias », par exemple.
Derrière ces espaces de co-working, c’est une nouvelle façon de travailler à la fois très conviviale et particulièrement efficace qui voit le jour. Comme le souligne l’un des membres de l’Atelier des Médias, Philippe Dorier : « Nous avons en fait créé un entreprise collaborative ultra-flexible et idéalement configurée pour affronter les marchés actuels… »
Un nouveau monde du travail est en train de naître…
(*) « La nouvelle société du coût marginal zéro » de Jeremy Rifkin, Editions « Les liens qui libèrent ».