En effet, Netri est une start-up industrielle lyonnaise créée en juin 2018 par mon associé Florent Laramandi et moi-même, tous deux issus du CNRS. Nous développons des dispositifs médicaux et, aujourd’hui, nous comptons 32 employés. En 2023, notre chiffre d’affaires était de 1 million d’euros et nous prévoyons 3,4 millions d’euros pour 2024. Nous espérons atteindre le seuil de rentabilité cette année. Nous sommes installés à Gerland, un lieu bien connu pour la recherche médicale.
Parlez-nous de votre cœur de métier. La recherche médicale est un domaine vaste, mais votre spécialité est très particulière ?
Nous évoluons dans le développement de médicaments. Un médicament coûte environ un milliard d’euros à développer, nécessite 10 ans de recherche et a un taux d’échec de 90 %. Cependant, la pandémie de COVID-19 a montré que nous pouvions accélérer ce processus grâce à de nouvelles technologies comme l’ARN messager. Ces médicaments doivent passer par des phases précliniques et cliniques, contrôlées par des agences réglementaires telles que l’ANSM en France et la FDA aux États-Unis. Ces agences évaluent la sécurité et l’efficacité des médicaments avant leur mise sur le marché.
Nous avons constaté qu’il était impossible de traiter certaines maladies rares car économiquement, il n’est pas viable d’investir un milliard d’euros pour un faible nombre de patients. De plus, nous ne pouvons plus accepter de sacrifier des millions d’animaux pour un taux de succès aussi faible chez l’humain. C’est pourquoi nous avons décidé de développer des dispositifs recréant des mini-organes humains à partir de cellules souches pour tester les effets des médicaments dès les phases précliniques. Cela permet de gagner du temps, d’économiser de l’argent et d’éviter les tests sur les animaux.
Quels sont les bénéfices concrets de vos dispositifs ?
Un exemple concret est notre dispositif de peau innervée. Il permet de tester l’effet de crèmes ou d’ingrédients thérapeutiques en dermatocosmétique sur la peau humaine et les neurones humains, prévoyant ainsi les effets bénéfiques ou irritants sur des pathologies comme l’eczéma. Ces tests sont essentiels pour les industries de la cosmétique et de la pharmacie.
Un autre exemple est notre dispositif de douleur sur puce, qui permet de quantifier et de mesurer l’impact de nouvelles chimiothérapies sur la douleur. Cela aide à éviter de commercialiser des traitements qui, bien qu’efficaces contre le cancer, provoquent des douleurs chroniques.
Votre travail ouvre-t-il des perspectives de recherche pour d’autres maladies ?
Absolument. Nous pouvons développer des dispositifs pour tester des traitements sur différents organes comme le foie, les intestins et les reins. Notre objectif est de combiner ces dispositifs pour simuler des interactions complexes entre organes, ce qui permettra de tester l’efficacité et les effets secondaires des traitements de manière plus rapide et précise. Nous espérons réduire le temps de développement des médicaments et augmenter leur taux de succès.
Qu’en est-il des effets secondaires des médicaments ?
Les effets secondaires sont une préoccupation majeure. Nos dispositifs permettent d’anticiper et de quantifier ces effets dès les phases précliniques, en utilisant des cellules humaines provenant de divers groupes de population. Cela nous permet de développer des médicaments plus sûrs et adaptés à une plus large diversité de patients, y compris ceux atteints de maladies rares.
Pensez-vous qu’il sera possible de personnaliser les traitements médicaux grâce à vos dispositifs ?
Oui, c’est une possibilité. Nous pouvons tester des médicaments directement sur des cellules provenant de patients individuels, ce qui ouvre la voie à des traitements personnalisés. Bien que la personnalisation complète pour chaque patient soit encore coûteuse, nous pouvons adapter les traitements pour mieux répondre aux besoins spécifiques de groupes de patients.
En conclusion, quel est le défi majeur pour votre secteur en ce début de siècle ?
Le défi majeur est de développer des médicaments de manière plus rapide, plus sûre et plus efficace, tout en réduisant les coûts et les risques. La pandémie de COVID-19 a souligné l’importance de la recherche médicale et la nécessité d’innover pour mieux répondre aux crises sanitaires futures.
Merci beaucoup Thibault d’être venu sur notre plateau. Nous vous suivrons avec intérêt dans cette belle aventure.
Merci à vous de nous avoir suivis. Vous pouvez retrouver cet entretien sur notre site internet, nos réseaux sociaux et notre chaîne YouTube. Très belle fin de journée à l’écoute de notre émission. À bientôt