Stéphane Labartino (Comongo) : «redonner du sens à la stratégie d’entreprise»
La Rédaction : Pouvez-vous nous expliquer le concept de Comongo en quelques mots ?
Stéphane Labartino : Comongo, et l’outil d’analyse sémantique que nous avons développé, Comonimage, permettent de faire un diagnostic de l’image d’une entreprise en nous basant sur le ressenti des personnes au cœur de son écosystème. En fonction des priorités et des objectifs de chacun de nos clients, Comonimage génère un questionnaire ouvert envoyé aux publics-cibles de l’entreprise choisis par le client : des collaborateurs aux clients, en passant par l’ensemble des partenaires. Leurs réponses, analysées par Comonimage, permettent de faire ressortir avec une extrême précision des informations hautement stratégiques pour l’entreprise, notamment pour comprendre quelles sont leurs propositions de valeur les plus pertinentes, ce qui les rend uniques, ce qui génère de l’adhésion, mais aussi ce qui provoque du rejet. Grâce à l’analyse de corpus de données limitées en nombre, mais disposant d’une forte valeur ajoutée en raison d’un ciblage très fin, nous générons ce que nous appelons de la Beautiful Data : de la donnée contextualisée qui apporte du sens et éclaire concrètement la prise de décision.
Pourquoi ce choix de la Beautiful Data à l’heure où tout le monde ne jure que par le Big Data ?
S. Labartino : Le choix de la Beautiful Data est celui du qualitatif sur le quantitatif. C’est un point de différence fondamental, presque philosophique, qui m’oppose à certaines tendances actuelles du monde de la technologie et, au-delà, de la stratégie d’entreprise. Le point de rupture a été pour moi la crise économique de 2008. Directeur Général d’une filiale européenne d’une agence de communication américaine à l’époque, j’ai été témoin de l’intérieur d’une forme de déstructuration du monde de l’entreprise. Je gérais une équipe de 15 personnes qui travaillait pour divers grands groupes et j’ai vu les budgets être coupés les uns après les autres et les membres de notre équipe devenir des « commodities » : des postes de dépenses à supprimer. Nos clients ont cherché à obtenir de l’analyse stratégique à moindre coût, ils ont fait appel à des agences à l’international, avec des cellules dans des pays en développement qui ne connaissaient rien de leurs marchés locaux et de leur situation propre. Depuis 10 ans, cette tendance au low-cost s’est transformée en automatisation et en remplacement des compétences humaines par des algorithmes traitant des données massives de manière quantitative. C’est dans ce contexte qu’est apparu le Big Data, un outil utile et efficace, mais qui a des limites, notamment pour rendre compte des réalités contextuelles. C’est en constatant cette nouvelle donne et le changement de posture face aux compétences humaines né de la crise de 2008, que j’ai commencé à réfléchir à un modèle pour remettre le talent au centre de l’échiquier. C’est l’idée de départ de la Beautiful Data. Le parti-pris de dire que la technologie ne peut rien sans compétences et arbitrages humains. À la différence du Big Data, qui est aveuglé par l’effet de masse, la Beautiful Data propose des données contextualisées et sélectionnées pour répondre aux besoins spécifiques de chaque structure à la manière des études et audits qualitatifs.
L’automatisation du monde du conseil et de la stratégie est-elle à l’origine de votre idée de créer Comongo ?
S. L. : Exactement. Plutôt que d’accepter la course au moins-disant et de proposer des analyses stratégiques hâtives et dénuées de pâte humaine, j’ai réalisé que la vraie clé pour sortir de cette situation se trouvait dans la méthode. Un travail de méthode et d’introspection pour comprendre les besoins et les attentes, proposer des études qualifiées et qualitatives, mais aussi et surtout pour faire monter les clients en compétence. Tout le monde est perdant, et le niveau général décline, si on accepte uniquement la vue globale des ontologies de domaine pour norme. D’où le besoin de changer et de faire du travail qualitatif pour ne serait-ce que se différencier dans son domaine et de sa concurrence. Le changement commence toujours par soi-même. Je me suis donc remis en question, et j’ai fait évoluer ma méthodologie de consultant avec mes clients. Pour faire ressortir du sens, j’ai eu de plus en plus tendance à poser des questions ouvertes à mes clients et à leurs publics-cibles. Une méthodologie qui est déjà celle de Comongo, mais qui a pris une toute autre ampleur dans les années qui ont suivi, quand j’ai eu la chance de rencontrer des chercheurs et des personnes du monde universitaire spécialisés dans les sciences du langage. C’est avec eux que j’ai pu développer un outil d’analyse sémantique unique au monde, Comonimage, qui analyse le ressenti de l’écosystème stratégique d’une entreprise pour identifier ses forces et ses faiblesses. Cette rencontre m’a permis, comme je le souhaitais depuis longtemps, d’automatiser le recueil et l’analyse de données tout en gardant un état d’esprit de consultant : donc de proposer des études de qualité tout en réduisant les coûts et en les rendant accessibles à toutes les entreprises, y compris aux PME.
Comonimage est un logiciel d’intelligence artificielle, qu’est-ce qui le différencie des autres solutions technologiques disponibles sur le marché ?
S. L. : L’intelligence artificielle doit être pensée pour augmenter les capacités des Hommes à prendre les bonnes décisions. L’outil ne peut pas imposer une décision sans contexte. Cela n’est pas efficace et c’est même dangereux. Comonimage est un outil technologique extrêmement puissant, qui nous permet de compiler et de traiter de manière rapide et pointue des informations qui seraient sinon fastidieuses, voire impossible, à obtenir. Mais ce formidable outil technologique est, et doit rester, justement un outil, qui est intéressant à exploiter lorsque l’humain lui donne du sens, des idées et du contexte. La grande différence de Comongo, c’est que nous travaillons en synergie constante entre le logiciel, nos clients et nos équipes. Si c’est l’outil qui donne le diagnostic, c’est le client qui donne le contexte et qui co-construit l’étude. C’est lui qui définit les sujets, les objectifs et les personnes-cibles à interroger. On réalise un vrai travail à ses côtés pour lui permettre de s’approprier les résultats et d’être plus efficace dans la mise en place du changement à opérer pour améliorer son positionnement, ses discours et/ou ses actions. Depuis qu’on a le démonstrateur Comonimage, nous n’avons plus besoin de convaincre nos interlocuteurs de la pertinence de nos études. Ils connaissent les sources de la donnée et la valeur des informations qu’ils vont rechercher à travers le questionnaire proposé par Comonimage et du coup, les réponses et le diagnostic ont du sens. Cela leur permet d’entrer rapidement dans une dynamique de changement. D’ailleurs, on constate que les diagnostics de Comonimage stimulent le besoin d’actions d’amélioration et sont le plus souvent suivis de prises de décision qui sont rapidement entérinées au sein des structures de nos clients. La preuve en est que et que nos clients veulent toujours revenir travailler avec nous une fois qu’ils ont engagé une conduite de changement pour évaluer leur trajectoire d’amélioration en continu. Grâce à Comonimage, nous leur proposons un véritable éclairage de situations même complexes. C’est très important dans une société qui propose des solutions miracles, mais qui n’offre pas réellement de sens. C’est bon pour tout le monde de revenir aux fondamentaux du feedback des communications interpersonnelles, qui est la base des sciences de l’information et des communications et par extension du commerce, du management et de l’entreprenariat en général, me semble-t-il.
Pour conclure, quels sont selon vous les principaux avantages pour vos clients de la méthode Comongo et de son outil Comonimage ?
S. L. : Il y a tout d’abord, comme nous venons de le voir, l’apport de sens et l’accompagnement dans la démarche de changement que nous proposons. On apprend de son écosystème et on progresse grâce à lui. C’est un peu comme quand on se regarde dans un miroir avant de partir au travail : un coup d’œil suffit à voir ce qui va, ce qui ne va pas, et ce qu’il faut faire pour rectifier un épi mal coiffé ou une cravate mise de travers. On offre à nos clients une approche concrète, pragmatique et de proximité, car pour la plupart des entreprises, ce n’est pas seulement ce qui est dit sur les réseaux sociaux qui compte, mais le ressenti des 10, 20, 100 personnes qui gravitent autour de l’organisation, que ce soit les clients, les fournisseurs, les prestataires ou les employés. Mais tout en apportant du sens, nous garantissons également, et surtout, des diagnostics d’une extrême précision. À titre d’exemple, nous obtenons des performances tout à fait similaires à celles obtenues dans le cadre de vastes études de benchmarking, malgré des budgets largement inférieurs et pour un temps de réalisation jusqu’à dix fois plus court. Et nous n’en sommes qu’au début. C’est aussi ça l’avantage de la Beautiful Data : en faisant le choix de la qualité et du petit nombre, nous réduisons très sensiblement les coûts et les délais sans remettre en cause la précision et la fiabilité de nos résultats. Nous rendons donc accessibles des études stratégiques à des entreprises de toutes tailles qui n’ont pas forcément les moyens de s’offrir les services d’équipes de consultants.