Immobilier : un frémissement en Auvergne-Rhône-Alpes, mais la reprise reste fragile

Après une année 2023 marquée par un effondrement brutal des volumes de transactions, les premiers signaux d’un redémarrage du marché immobilier se dessinent. Selon l’Observatoire Interkab T1 2025, plusieurs départements d’Auvergne-Rhône-Alpes enregistrent un regain d’activité. Mais les professionnels restent prudents : la reprise est inégale, dépend fortement du type de bien, et les marges de manœuvre financières des acquéreurs restent contraintes.
Un regain d’activité perceptible dans certains territoires
La Boîte Immo, qui fédère plus de 8 000 agences indépendantes via sa plateforme Interkab, livre chaque trimestre une photographie fine du marché immobilier. Pour ce premier trimestre 2025, les signaux positifs restent encore timides mais bien réels, notamment dans certains territoires d’Auvergne-Rhône-Alpes.
L’étude met en évidence une hausse du volume de mandats par rapport au dernier trimestre 2024, ce qui témoigne d’un retour des vendeurs sur le marché. En parallèle, une partie des acquéreurs, jusque-là attentistes, semblent à nouveau enclins à concrétiser leur projet, profitant d’une légère détente des taux d’intérêt.
Les départements de l’Ardèche, de la Haute-Loire ou encore du Puy-de-Dôme font partie des zones où les professionnels interrogés font état d’un regain d’activité notable. Cette reprise reste néanmoins relative et très localisée. Elle ne compense pas encore les volumes d’avant-crise, mais elle tranche avec le gel observé au cours du second semestre 2023.
Des profils d’acquéreurs et de vendeurs en mutation
La typologie des transactions évolue, à l’image des attentes des ménages. En zone rurale et périurbaine, les maisons avec extérieur restent les produits les plus recherchés, mais les acquéreurs sont plus exigeants qu’auparavant sur la qualité du bien, sa performance énergétique, et surtout son prix.
Du côté des vendeurs, le retour à la réalité semble amorcé. Après plusieurs mois de déconnexion entre l’offre et la demande, les prix se réajustent progressivement, ce qui contribue à fluidifier certaines négociations. Mais ce mouvement reste lent, parfois insuffisant pour relancer véritablement les signatures.
Le marché devient plus sélectif : les biens atypiques ou surévalués peinent à trouver preneur. À l’inverse, les biens bien situés, avec un bon DPE, et proposés à un prix cohérent partent plus rapidement – souvent en moins de deux mois.
L’Auvergne-Rhône-Alpes, un marché à plusieurs vitesses
Derrière les moyennes régionales, de fortes disparités subsistent. Le marché de Lyon reste l’un des plus tendus, tant en termes de prix que d’offre. Les primo-accédants y rencontrent toujours des difficultés d’accès au crédit, et la hausse des taux survenue en 2023 n’a pas encore été totalement absorbée.
À l’inverse, certaines zones intermédiaires, notamment en vallée du Rhône ou dans les agglomérations moyennes comme Montélimar, Aurillac ou Le Puy-en-Velay, attirent une clientèle de report. Ces territoires bénéficient d’une meilleure accessibilité financière, d’un cadre de vie attractif, et d’un foncier encore disponible. Ils représentent des marchés d’opportunité pour les acquéreurs mobiles ou en reconversion de vie post-Covid.
Les agences indépendantes en première ligne
Interkab donne également la parole aux professionnels du terrain. Leur message est clair : sans visibilité sur la stabilité des taux ou les politiques publiques en matière de logement, la prudence reste de mise. Si certains signaux sont encourageants, la reprise n’a rien de mécanique et peut facilement être remise en cause par des tensions exogènes – qu’elles soient économiques ou politiques.
Les agents immobiliers indépendants, notamment en milieu rural ou dans les zones de moyenne densité, jouent un rôle clé dans cette période charnière. Ils doivent composer avec des clients fragilisés, des délais de vente plus longs, et une charge de travail accrue liée à la complexification des dossiers.
Pour tenir, beaucoup misent sur la mutualisation des outils numériques, sur des réseaux comme Interkab ou encore sur la montée en compétence sur le DPE, les aides à la rénovation ou les stratégies de vente différenciées.
Un marché qui exige humilité et adaptabilité
Dans ce contexte mouvant, difficile de prédire si 2025 marquera un véritable rebond ou une simple stabilisation technique. Les professionnels de la région évoquent avec lucidité une reprise « fragile mais possible », et insistent sur l’importance de s’adapter localement aux besoins réels des habitants. L’Auvergne-Rhône-Alpes ne forme pas un marché unique, mais une mosaïque de territoires, avec des réalités économiques, sociales et foncières profondément différentes.
L’évolution du crédit, les mesures fiscales à venir et la dynamique de l’emploi local seront des déterminants majeurs dans les mois à venir. Une chose est sûre : dans un paysage en recomposition, les acteurs de proximité resteront les mieux placés pour décrypter les signaux faibles et accompagner les mutations du secteur.